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Protéger nos enfants des contenus pornographiques. Si cette volonté est bien réelle, il n’est pas chose aisée de l’appliquer. D’ailleurs, à 14 ans, plus de six jeunes sur dix ont déjà été exposés à la pornographie, selon un sondage OpinionWay de 2018, pour 20 minutes

En quelques clics seulement, un mineur peut visionner des images X à l’infini. Cette facilité d’accès effraie les parents qui se trouvent souvent démunis face à cette situation.

Prévenir et anticiper…

Aborder la question de la pornographie avec son enfant/adolescent n’est pas facile mais l’hyper sexualisation de la société rend indispensable d’en parler et d’anticiper. Aujourd’hui, avec l’accès des plus jeunes aux écrans et surtout à internet, le risque qu’ils voient des images pornographiques est accru et rend les plus jeunes très vulnérables.

Prévenir votre enfant l’aidera à vous en parler et il saura comment réagir s’il tombe par hasard sur des images choquantes. Anticipez en lui expliquant qu’il peut voir malencontreusement des images qui le perturbent, le mettent mal à l’aise ou le gênent; et si tel est le cas qu’il doit en parler.

Comprendre, discuter, expliquer…

Si votre enfant a vu des images choquantes, essayez de savoir où et comment il les a vues, demandez-lui ce qu’il a ressenti. Ne procédez pas à un interrogatoire mais essayez de percevoir ce qu’il a compris, interprété ou éprouvé.

S’il les a vues par hasard, déculpabilisez-le ! Il ne doit pas avoir honte et ne doit pas se sentir coupable, ce n’est pas de sa faute. Rassurez-le, dites-lui qu’il a le droit d’être choqué, que ces images vous dérangent aussi et que vous les désapprouvez. S’il semble vraiment marqué par ce qu’il a vu et que vous n’arrivez pas à en parler avec lui, n’hésitez pas à consulter le médecin de votre enfant.

Si vous vous apercevez qu’il regarde de lui-même des images pornographiques, ne dramatisez pas. Instaurez un dialogue et expliquez-lui que ce n’est pas normal. Évoquez la valeur des règles familiales importantes et revoyez ensemble les principes d’utilisation des écrans et d’internet.

Des études montrent qu’il peut exister un comportement de dépendance principalement chez les garçons. Cette attitude peut être préoccupante c’est pourquoi il convient d’en parler sans tabou avec votre enfant.

En général, le visionnage reste souvent involontaire ou épisodique mais les conséquences ne sont pas négligeables pour autant. Elles peuvent perturber la construction de la sexualité de l’enfant ou de l’adolescent.

Expliquer l’importance des valeurs familiales

Après avoir vu des images pornographiques un enfant risque de se faire une fausse idée des relations hommes/femmes. Il faut que vous abordiez avec lui les valeurs que sont d’abord l’amour, la tendresse et le respect de l’autre. Reparlez de la sexualité qui sert à la reproduction mais qui est aussi un acte de plaisir, de tendresse et d’amour.

Enfin n’oubliez pas de lui dire que la pornographie n’est pas la réalité, ce sont des acteurs qui tournent une fiction. Dans la vraie vie la sexualité est différente.

Gérer le risque et poser les limites

Laisseriez-vous sortir votre enfant à 10h du soir dans un quartier inconnu? La réponse semble évidente, vous pouvez alors considérer qu’internet est ce quartier…

Aujourd’hui le principal accès à des images choquantes est internet, il convient donc d’instaurer des règles quant à son utilisation. Un enfant doit être accompagné lorsqu’il est sur le net. Les filtres ne suffisent pas et le contrôle parental n’est pas efficace à 100%.

Le seul moyen de créer un filtre efficace est donc d’être auprès de votre enfant. Vers 9 ans il naviguera seul, il est alors conseillé que l’accès à internet se situe dans une pièce passante, ne laissez pas votre enfant seul dans sa chambre.

Définissez ces règles en accord avec votre enfant et profitez-en pour lui expliquer les dangers/risques d’internet. Il doit être conscient qu’il ne s’agit pas là d’une punition mais d’une protection.

La majorité des téléphones portables ont accès à internet aujourd’hui et sont souvent plus discrets que les ordinateurs familiaux pour le visionnage de photos/vidéos sur le net. Là encore, définissez des règles, prenez un forfait sans internet, demandez-lui de l’éteindre et de le laisser en dehors de sa chambre le soir…

Il existe de nombreux sites pour prévenir des dangers d’internet que vous retrouverez dans les liens utiles.

Enfin, n’oubliez pas la télévision. Elle aussi propose des programmes à vocation pornographique. C’est une raison supplémentaire pour déconseiller formellement la télé dans la chambre !

Le traumatisme des images pornos

Parallèlement au lancement d’un portail national, une campagne de sensibilisation a été lancée pour interpeller les enfants et les adolescents. Dans ce spot, on y voit une petite fille demander à ses parents « comment on fait les bébés ? ». À cette question, c’est son frère, guère plus âgé, qui lui répond : « La femme, elle est à quatre pattes. L’homme lui tire les cheveux, et elle crie très fort ».

Depuis plusieurs années, les professionnels s’accordent à dire que l’exposition prématurée des mineurs aux contenus pornographiques peut engendrer de graves conséquences : choc ou traumatisme, notamment lors d’une exposition involontaire.

« Près d’un quart des jeunes déclarent que la pornographie a eu un impact négatif sur leur sexualité en leur donnant des complexes et 44% des jeunes ayant des rapports sexuels déclarent reproduire des pratiques qu’ils ont vues dans des vidéos pornographiques », explique l’exécutif.

Les enseignants se retrouvent souvent confrontés à des cas difficiles à gérer. Maryline peut en témoigner. Cette institutrice d’une école primaire a maintes fois dû solliciter un psychologue pour un de ses élèves. « L’enfant, qui est en CE1, ne cessait de jouer avec ses parties intimes en classe. Quand je l’ai surpris la première fois, je lui ai demandé de cesser. Mais il a continué. Je lui ai de nouveau parlé. À ma grande surprise, il m’a lancé qu’il aimait cette sensation. Puis il a commencé à m’insulter. »

Face à l’étendue du problème, Maryline a appelé les parents de l’élève. Après enquête, il s’est avéré que l’enfant avait facilement accès à des films pornographiques sur le téléphone portable de son père. Depuis, l’enfant est suivi par un psychologue.

Les collèges ne sont pas épargnés par ce phénomène. « En général, les ados affichent une grande discrétion sur le sujet, surtout vis à vis des enseignants. Même si entre camarades de classe, surtout chez les garçons, ils en parlent ouvertement et ils échangent des informations sur les sites Web à visiter », me confie un prof de collège.

Cet enseignant du secondaire attribue cette situation à la facilité d’accéder à Internet, peu importe où on se trouve. « Grâce aux nombreux outils de communication dont disposent les adolescents, qui sont influencés par leurs pairs ou parfois indirectement par les adultes, ils sont nombreux à se rendre sur des sites Web pornographiques. Ils savent pertinemment comment contourner les garde-fous. »

On estime qu’aussi longtemps que la sexualité demeurera un sujet tabou et que l’éducation sexuelle sera reléguée au second plan, le problème restera entier. « Si les parents, les décideurs, les animateurs et l’école n’assument pas leurs responsabilités face aux adolescents qui ont soif de connaissances sur le sujet, le problème empirera. Ces derniers se tourneront vers les sites Web inappropriés qui offrent malheureusement une image déformée et pervertie de la sexualité. »

De la difficulté de parler à ses ados

Ce dispositif est une première pierre posée à un (long) édifice. « C’est une première étape, assure Thomas Rohmer, président de l’OPEN (Observatoire de la parentalité et de l’éducation numérique), il a l’avantage de centraliser les informations pour les parents, et il permet également une prise de conscience ».

Selon le président, il est nécessaire que les parents s’emparent du sujet.

Neuf adultes sur dix sont fuyants quand les ados évoquent la question de la sexualité. On en parle peu et mal. Résultat : c’est le porno qui fait le boulot car les jeunes vont trouver leurs réponses sur internet.

Thomas Rohmer Président de l’OPEN

Si l’Observatoire salue l’initiative du gouvernement, il regrette que l’Éducation nationale soit la grande absente de ce débat. Là où tout se joue. « Il y a un véritable enjeu éducatif. On peut parler du consentement dès la maternelle, sans parler de sexualité. La sexualité est un sujet particulier et il ne faut pas laisser les enfants sans réponses », estime le président.

«Perception erronée de l’acte sexuel»

Le fait que des adolescents visionnent des images à caractère pornographique peut gangrener leur pensée. « Ils en sont encore au stade de développement. Les adolescents perçoivent ces images et vidéos à caractère obscène, considérées comme taboues, comme un plaisir interdit mais tellement attrayant. La dangerosité est plus prononcée parce que les adolescents peuvent développer une perception erronée de l’acte sexuel qui aura forcément des répercussions sur eux. »

Pour les psychologues, il n’y aura pas de remède miracle tant que l’utilisation du téléphone portable n’est pas strictement contrôlée par les adultes.

Ils insistent sur le fait qu’il faut parler de la sexualité aux enfants dès le primaire. « Il faut leur parler de ce sujet très tôt. Cela leur permettra de se respecter et de respecter les autres. Avec les mots justes, ils apprendront comment ils sont venus au monde. Cela leur permettra aussi d’apprendre la beauté de la sexualité. »


Questions à… Virginie Bissessur, psychologue clinicienne : «Ils ne comprennent pas que c’est un jeu d’acteurs»

Quel est l’impact de la pornographie sur un enfant ?
La pornographie est dangereuse pour les enfants car elle les expose brutalement à une sexualité alors qu’ils n’ont pas les moyens intellectuels et émotionnels de la comprendre. Cela peut affecter la façon dont ils aborderont leur propre sexualité plus tard. De plus, la pornographie d’aujourd’hui, dans toute sa violence, ne reflète pas la sexualité normale des adultes. Les enfants ne comprennent pas que c’est de la fiction et un jeu d’acteurs. Avec ce genre d’exposition, ils ne comprennent pas que la sexualité doit se faire dans l’amour, dans la tendresse et avec le consentement mutuel.

Qui sont les enfants les plus vulnérables ?
Les plus vulnérables sont ceux qui sont laissés sans la surveillance de leurs parents quand ils surfent sur le Net. Ceux qui n’ont pas de dialogue avec leurs parents sur la sexualité le sont aussi, car à l’adolescence, ils se poseront inévitablement des questions. S’ils ne trouvent pas de réponses de leurs parents ou d’un adulte qui peut tenir un discours adapté sur la sexualité, ils iront chercher des explications sur la Toile.

Que peuvent faire les parents ?
C’est aux parents d’équiper les ordinateurs et téléphones portables d’un contrôle parental. Ils doivent prendre leur courage à deux mains et en parler avec leurs adolescents. Même si c’est une conversation difficile et gênante, il est de leur devoir d’informer leurs enfants et de les protéger des dangers de la pornographie sur Internet.

L’enfant est considéré comme tel jusqu’à quel âge ?
En France, la majorité sexuelle est fixée à 15 ans. Cela ne signifie pas que des enfants n’ont pas d’activité sexuelle avant cet âge. Dès leur plus jeune âge, certains ont une activité masturbatoire tandis que d’autres jouent au docteur. C’est normal. Cela fait partie de la découverte sensorielle de son corps.

Renforcement du contrôle parental

L’une des armes dans la lutte au contenu porno accessible aux mineurs reste le contrôle parental. En 2019 déjà, un protocole d’engagement contre l’exposition des mineurs à la pornographie a été signé par le CSA, les principaux acteurs d’internet, ainsi que des associations de protection de l’enfance.

Il vise à « mettre en place une solution intégrée de contrôle parental pour protéger les mineurs. Le contrôle parental est méconnu et sous-utilisé : un Français sur trois ne le connaît pas. Nous devons aujourd’hui faciliter son usage », énonce Adrien Taquet dans une interview accordée à 20 minutes

Le contrôle parental : de quoi s’agît-il ?

Via une application ou un logiciel, le système de contrôle parental détecte automatiquement les contenus inadaptés et empêche l’accès aux sites pornographiques. Il est configuré par les parents et protégé par un mot de passe.
Aujourd’hui, il existe pléthore d’outils de contrôle parental, payants ou gratuits. « Le plus simple est d’utiliser les outils fournis par votre opérateur mobile ou internet, ou encore ceux intégrés dans le système d’exploitation de l’appareil de votre enfant », alerte l’ARCEP (Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse).

Quelles solutions ? 

Autre étape dans ce combat : l’adoption dun amendement en juin 2020 obligeant les sites pornographiques à vérifier l’âge de leurs utilisateurs. En cas de non-respect, le CSA peut saisir la justice pour demander aux fournisseurs d’accès à internet de couper l’accès à ces sites

À ce titre, fin 2020, trois associations avaient saisi le gendarme de l’audiovisuel pour obtenir le blocage de huit sites pornographiques, révélait Le Figaro

« On ne leur demande pas une obligation de résultats, mais une obligation de moyens. C’est à eux de faire en sorte d’appliquer la règle », lâche Thomas Rohmer.

Et même si la solution miracle n’existe pas face à ce phénomène, il est important de « marquer une ligne jaune pour nos enfants ».

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